Premier sourire du printemps

 

Premier sourire du printemps

Tandis qu'à leurs œuvres perverses
Les hommes courent haletants,
Mars qui rit, malgré les averses,
Prépare en secret le printemps.

Pour les petites pâquerettes,
Sournoisement lorsque tout dort,
Il repasse des collerettes
Et cisèle des boutons d’or.

Dans le verger et dans la vigne,
Il s'en va, furtif perruquier,
Avec une houppe de cygne,
Poudrer à frimas l’amandier.

La nature au lit se repose ;
Lui descend au jardin désert,
Et lace les boutons de rose
Dans leur corset de velours vert.

Tout en composant des solfèges,
Qu'aux merles il siffle à mi-voix,
Il sème aux prés les perce-neige
Et les violettes aux bois.

Sur le cresson de la fontaine
Où le cerf boit, l'oreille au guet,
De sa main cachée il égrène
Les grelots d'argent du muguet.

Sous l'herbe, pour que tu la cueilles,
Il met la fraise au teint vermeil,
Et te tresse un chapeau de feuilles
Pour te garantir du soleil.

Puis, lorsque sa besogne est faite,
Et que son règne va finir,
Au seuil d'avril tournant la tête,
Il dit. " Printemps, tu peux venir! »

Théophile Gautier
Émaux et Camées

Effeuiller la marguerite

Effeuiller la marguerite : j'ai un faible pour cette expression, apparue au cours du XIXe siècle (et que d'aucuns attribuent à une ancienne croyance normande). Je suis sûr que vous l'avez tous mise en pratique... Voire que vous ne résistez toujours pas au plaisir d'arracher un à un les pétales de la fleur en énonçant les fameux "Il (elle) m'aime, un peu, beaucoup, passionnément, ..." et que vous continuez de sauter volontairement le "pas du tout" si c'est le dernier pétale.

Ah, je vois deux ou trois coquin(e)s qui se trémoussent sur leur chaise en souriant. Et je sais pourquoi : effeuiller la marguerite a aussi une signification plus... sensuelle. Signification qui nous rappelle que l'effeuillage n'est pas seulement une activité de jardinier. Et là, je vois mes deux ou trois coquin(e)s relire le début de ce billet pour déceler dans mon propos un éventuel sens caché.

Que voulez-vous, c'est l'printemps (comme dirait Léo Ferré ... ou Pierre Perret) !