Les écoliers

Eh oui, c'est déjà la fin des vacances. Dès lundi, on reprend le chemin de l'école !
Voici donc un poème de circonstance, quoique un peu désuet, de Maurice FOMBEURE (1906-1981) :

Les écoliers

Sur la route couleur de sable,
En capuchon noir et pointu,
Le “moyen”, le “bon”, le “passable”
Vont à galoches que veux-tu
Vers leur école intarissable.

Ils ont dans leur plumier des gommes
Et des hannetons du matin,
Dans leurs poches du pain, des pommes,
Des billes, ô précieux butin
Gagné sur d'autres petits hommes.

Ils ont la ruse et la paresse
Mais l'innocence et la fraîcheur
Près d'eux les filles ont des tresses
Et des yeux bleus couleur de fleur,
Et des vraies fleurs pour la maîtresse.
Puis les voilà tous à s'asseoir.

Dans l'école crépie de lune
On les enferme jusqu'au soir,
Jusqu'à ce qu'il leur pousse plume
Pour s'envoler. Après, bonsoir !

Pour un art poétique

Raymond Queneau, vous connaissez ? Ce romancier et poète, cofondateur du groupe littéraire Oulipo, nous a laissé quelques textes poétiques qui sortent parfois sérieusement des sentiers battus. En voici un exemple (je vous en proposerai un autre très bientôt) :

Pour un art poétique

Prenez un mot prenez en deux
faites les cuir’ comme des oeufs
prenez un petit bout de sens
puis un grand morceau d’innocence
faites chauffer à petit feu
au petit feu de la technique
versez la sauce énigmatique
saupoudrez de quelques étoiles
poivrez et mettez les voiles
Où voulez vous donc en venir ?
À écrire Vraiment ? À écrire ?

Citation de Louis Calaferte

Il n'y a pas de mesure à la mesure des mots. Il ne viendrait à personne l'idée de mettre un frein à la clarté nue de midi en été. Les mots. Silex et diamant.
Louis CALAFERTE

Le chat et l'oiseau

En ce beau lundi du mois d'août, je vous propose ce poème pour lequel j'ai eu un coup de cœur. Le connaissez-vous ?

Le chat et l’oiseau

Un village écoute désolé
Le chant d’un oiseau blessé
C’est le seul oiseau du village
Et c’est le seul chat du village
Qui l’a à moitié dévoré
Et l’oiseau cesse de chanter
Le chat cesse de ronronner et de se lécher le museau
Et le village fait à l’oiseau de merveilleuses funérailles
Et le chat qui est invité
Marche derrière le petit cercueil de paille
Où l’oiseau allongé
Porté par une petite fille qui n’arrête pas de pleurer
Si j’avais su que ça ferait tant de peine
Lui dit le chat
Je l’aurais mangé tout entier
Et puis je t’aurais raconté que je l’avais vu s’envoler
S’envoler jusqu’au bout du monde
Là-bas, c’est tellement loin que jamais on n’en revient
Tu aurais eu moins de chagrin
Simplement de la tristesse et des regrets
Il ne faut jamais faire les choses à moitié.

Jacques PRÉVERT

Toujours et Jamais

Ce petit poème met en scène... deux mots. Et pourquoi pas ?

Toujours et Jamais

Toujours et Jamais étaient toujours ensemble et ne se quittaient jamais.
On les rencontrait dans toutes les foires.
On les voyait le soir traverser le village sur un tandem.
Toujours guidait
Jamais pédalait
C’est du moins ce qu’on supposait…
Ils avaient tous les deux une jolie casquette.
L’une était noire à carreaux blancs
L’autre blanche à carreaux noirs
A cela on aurait pu les reconnaître
Mais ils passaient toujours le soir
et avec la vitesse…
Certains d’ailleurs les soupçonnaient
Non sans raison peut-être
D’échanger certains soirs leur casquette
Une autre particularité
Aurait dû les distinguer
L’un disait toujours bonjour
L’autre toujours bonsoir
Mais on ne sut jamais
Si c’était Toujours qui disait bonjour
Ou Jamais qui disait bonsoir
Car entre eux ils s’appelaient toujours
Monsieur Albert Monsieur Octave

Paul VINCENSINI

Citation de Michèle Mailhot


L'écriture, toute écriture, reste une audace et un courage. Et représente un énorme travail.
Michèle MAILHOT, La Vie arrachée

En Arles

Le nom de ce poète, Paul-Jean TOULET (1867-1920), ne vous dit peut-être pas grand-chose. Il fut pourtant le chef de file de l'école fantaisiste, née en 1912. En voici un texte :


En Arles

Dans Arles, où sont les Aliscams,
Quand l'ombre est rouge, sous les roses,
Et clair le temps,

Prends garde à la douceur des choses.
Lorsque tu sens battre sans cause
Ton coeur trop lourd ;

Et que se taisent les colombes :
Parle tout bas, si c'est d'amour,
Au bord des tombes.

Citation de Sylvie Germain

Écrire, c'est tâter le monde. Essayer d'en tester la peau, la dureté, la tendresse. L'écriture est un des moyens de tâtonnements du monde. 
Sylvie GERMAIN
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